L'échec scolaire qui accompagne bon nombre de « dys » n’est pas une fatalité. le Dr Tomatis, chirurgien, spécialiste en oto-rhino-laryngologie, chercheur dans le domaine des troubles de l'audition et de la parole, affirmaient dans les années 1960 que "presque tous les enfants qui ne savent pas lire, écrire ou compter souffrent le plus souvent de troubles de l’audition »
Sous le terme de difficultés scolaires, on retrouve la famille des "dys" : dyscalculie, dysorthographie, dyspraxie, dysgraphie, dysphasie, et, le plus connu, dyslexie. Avec ces troubles spécifiques, les difficultés d'attention - concentration - mémoire sont presque systématiquement associées. Enfin, des problèmes émotionnels s'ajoutent fréquemment à ce tableau, ce qui peut entraîner une perte de motivation et de confiance en soi, mais aussi des problèmes plus importants de comportement et de socialisation.
Dys - audition/écoute
Par ses recherches, le Dr Tomatis a mis en évidence le rôle fondamental de l'oreille dans le développement du langage parlé et écrit. A quatre mois et demi de vie intra-utérine, l'oreille fonctionne déjà et le fœtus écoute la voix maternelle. À la naissance, l'enfant passe de l'audition en milieu liquide à l'audition en milieu aérien. Dans le brouillard sonore, l'enfant cherche à percevoir la voix de sa mère, premier contact vital de première importance. Bientôt les voix s'identifient de plus en plus rapidement, il s'agit alors de segmenter le discours en phrases, puis en mots, en syllabes et enfin en voyelles et consonnes.Pourtant, comme l'a montré le Dr Tomatis, une bonne audition ne suffit pas pour bien reproduire les sons et de fait la plupart des difficultés linguistiques, tant à l'oral qu'à l'écrit, ne sont pas liées à des problèmes auditifs (sensoriels) mais à des problèmes d'écoute (perceptifs).
Dyslexie , de l'oeil à l'Oreille
La dyslexie est généralement comprise comme la tendance à inverser les lettres - un problème lié à une mauvaise orientation spatiale et au séquençage linéaire. La dyslexie signifie des difficultés de lecture, on l'appelait à l'origine "cécité des mots" et on la ramenait à un problème visuel, par rapport au fait que l'un des premiers auteurs à publier sur le sujet était précisément un chirurgien ophtalmologiste, d'où l'importance initiale des difficultés visuelles. Des recherches ultérieures ont mis en évidence l'existence de marqueurs génétiques qui pourraient favoriser leur apparition, et plusieurs autres hypothèses se sont progressivement succédées.Des études récentes indiquent que les troubles de la parole et de l'ouïe sont à l'origine de la dyslexie.
Latéralisation hémisphérique.
Le développement d'un langage de qualité s'organise au départ d'une écoute précise. Par voie de conséquence, quand celle-ci est, dès l'origine déficiente, l'enfant rencontre des problèmes lorsqu'il s'agit d'aborder des tâches linguistiques plus complexes comme l'écriture et la lecture. Si les sons du langage n'ont pas été entendus avec précision, ils ne peuvent pas être convertis en symboles avec précision .
Les deux hémisphères cérébraux ont un rôle à jouer dans le traitement du langage, mais leurs tâches sont différentes. L'harmonie entre les deux hémisphères du cerveau est d'une importance fondamentale pour surmonter la dyslexie. L'hémisphère gauche du cerveau est le principal centre de traitement du langage. Pour que les sons du langage atteignent efficacement ces zones centrales, l'oreille droite doit prendre la tête du processus d'écoute, car l'oreille droite communique plus directement avec l'hémisphère gauche du cerveau que l'oreille gauche. Le Dr Tomatis a affirmé que les dyslexiques n'arrivaient pas à dominer correctement l'ouïe pendant leur développement, de sorte que l'ordre dans lequel ils percevaient les sons est confus. S'ils utilisent parfois l'oreille droite et parfois l'oreille gauche comme oreille dominante, les sons atteignent le cerveau à différentes vitesses de sorte que les lettres semblent se suivre en masse. Ceci est responsable d'erreurs d'inversion telles que l'écriture "bar" comme "pon" ou la prononciation de "spaghetti" comme "pisghetti".
Théories actuelles de l’oreille : de l’allophone au phonème
Actuellement, les études dans le domaine ne contredisent pas les théories avancées par Tomatis et apportent des précisions intéressantes. Les études sur la perception catégorielle chez les dyslexiques (Sprenger-Charolles & Serniclaes, 2004) suggèrent que l’origine de leur déficit proviendrait d’une anomalie de la perception catégorielle des phonèmes, sans conséquences évidentes pour la communication orale, mais avec une forte présomption d’incidence sur l’acquisition du langage écrit. En particulier, ce déficit pourrait expliquer les difficultés qu’ils rencontrent dans la mise en œuvre de la procédure par médiation phonologique, qui nécessite de relier les graphèmes aux phonèmes correspondants. Selon ces auteurs, le dyslexique perçoit des allophones d’un même phonème ; si tel est le cas, il va alors difficilement pouvoir effectuer l’opération de conversion graphèmes-phonèmes. Ce déficit pourrait également expliquer sa déficience en mémoire à court terme phonologique, pouvant provenir du poids des exigences de stockage dues à la taille élargie du répertoire catégoriel (allophonique plutôt que phonémique).
D’après d’autres études, cette trop grande sensibilité acoustique n’est pas tout à fait générale, mais consisterait surtout à accorder trop d’importance à des différences acoustiques particulières, en dehors des frontières pertinentes. La perception de telles différences correspondrait au maintien, anormal, de certaines prédispositions (mais pas toutes) permettant au bébé de moins de 9 mois de discriminer les phonèmes de toutes les langues. Toutefois, Serniclaes, Van Heghe, Mousty, Carré et Sprenger-Charolles (2004) parlent d’une perception allophonique, et non phonétique chez les dyslexiques. Les représentations phonologiques des dyslexiques ne seraient pas organisées autour de phonèmes, mais autour d’allophones, qui sont des variations d’un même phonème se manifestant en production de parole, dans la langue étudiée, sous l’effet de la coarticulation. On pourrait considérer que ces enfants ont conservé un mode de traitement de l’information sonore d’un enfant de moins de 9 mois et que ce type d’organisation l’amène à des catégorisations phonémiques erronées et trop lourdes à gérer pour les zones supérieures de traitement.
La thérapie d'écoute peut être considérée comme une réhabilitation fonctionnelle de l’oreille. En agissant sur les trois niveaux de l’audition : audition primaire, limbique et corticalisée, sur ses trois fonctions : vestibulaire, cochléaires et dynamogéniques, ainsi que sur ses deux plans : réceptifs et expressif, elle permet de réorganiser et de réguler le traitement de l’information sonore par les zones cérébrales y associées de manière systémique.
Plus spécifiquement, dans sa dimension actives, le traitement des sons du langage s’exerce et s’entraine par des exercices de lecture et de répétition de logatomes, de phonèmes, de mots et sous le contrôle de l’oreille électronique (appear).
Le montage micro - oreille électronique (appear) – casque, permet d’augmenter la précision, la vitesse et la justesse du contrôle audiophonatoire et structure ainsi l’organisation phonématique de la langue.
La priorisation des circuits droits, et l’ajustement des temps de contrôle des phonèmes participent à la préparation auditive de l’acte de lecture. Dans sa phase préparatoire (phase passive) la musique sert de support à l’activation de la bascule électronique qui est au cœur du dispositif curatif d’entrainement de l’écoute.Cette phase est primordiale dans la restauration des mécanismes auditifs sur un plan perceptifs avant leur mise en œuvre sur le plan expressif.
La musique est, en soit, une somme et une suite de sons très organisée que l'oreille est amenée à analyser. L'écoute de la musique sous oreille électronique de type Tomatis (appear) est donc un des rares moyens d'apprendre à percevoir les sons de façon structurée et harmonisée dans le flux du discours. Le déplacement vers la droite de la prévalence de l'écoute qui est poursuivi pendant la thérapie d'écoute induit progressivement une dominance droite de l’écoute, ce qui facilite grandement le traitement des sons du langage au niveau supérieur.
Les enfants ou les dyslexiques se sentent souvent dévalorisés en raison des échecs répétés qu'ils ont subis. Il est injuste qu'ils doivent travailler plus que n'importe qui d'autre pour obtenir des résultats médiocres. La thérapie de l'écoute offre un soulagement émotionnel immédiat notamment parce qu’elle ne place pas l’enfant devant sa difficulté mais devant ses ressources.
La thérapie de l'écoute peut être combinée avec toute autre intervention pédagogique déjà en place, comme par exemple la logopédie, la psychomotricité, la psychothérapie.
Les séances deviennent étonnamment rentables et les résultats rapides et stables.
Evaluation de la compétence d’écoute
L’évaluation du trouble d’apprentissage s’établit au départ d’un ensemble d’informations recueillies sous des formes différentes et à des moments différents du processus.Trois à quatre rendez-vous sont nécessaires à l’élaboration du profil. La première rencontre permet de comprendre la nature de la demande, de relever les éléments de l’histoire et du contexte de vie qui contribuent à maintenir l’enfant, l’adolescent ou l’adulte dans sa difficulté d’apprentissage. Le deuxième voire le troisième rendez-vous est consacré à la passation d’une série d’épreuves qui permettent de dresser le profil d’écoute de la personne ;
Listening profile : questionnaire
Test d’écoute de type Tomatis
Le BAC : Bilan d’audition centrale
Le P.A.T.T. Primary, Auditory, Threshold Test
Le dernier rendez-vous permet de rendre compte de la dynamique d’écoute limitante qui maintient l'enfant ou l'adolescent dans sa difficulté d’apprentissage, de préciser la nature de la demande et de proposer des pistes curatives d’aide et de soutien.
Le profil d'écoute
Le profil d’écoute s’établit autour de tests normalisés et non normalisés, d’un questionnaire, et d’une prise d’informations vivante. Notre intérêt n’est pas tant de figer la personne derrière un « étiquette » objectivante du trouble, que d’établir un profil d’écoute qui place la personne en tant que sujet au centre de sa démarche.
Listening profile (questionnaire)
Ce questionnaire, mis au point par Paul Madaule, psychologue et praticien Tomatis à Toronto propose une série de propositions qui portent sur un nombre de comportements distincts ou de caractéristiques qui peuvent être le résultat des difficultés spécifiques d'écoute ou en relation à l'écoute. Ces questions prennent la forme d'un questionnaire complété par les parents de l'enfant ou un éducateur. Ces questions sont regroupées et classées en fonction d'une analyse raisonnée à partir de notre définition de l'écoute. Cette définition est basée sur ce qui est considéré comme étant les trois idées fondamentales à la base de l’audio-psycho-phonologie.
Ces fondements sont :
Le but du Questionnaire d’Écoute est d’identifier à quel endroit précis l’écoute est défectueuse. Ensuite, la Roue de l’Écoute permettra d’identifier éventuellement un profil d’écoute.
Le test d’écoute
Le Dr Tomatis a développé un test qui permet de mettre en évidence la présence d'éventuelles distorsions de l'écoute, telles que : difficulté à analyser les sons (variation de la hauteur tonale et sens de cette variation), difficulté à localiser les sons, distorsions auditives, hypersensibilité auditive, problèmes de latéralité auditive, etc...
Le test d’écoute est composé de plusieurs épreuves :
Le test d’écoute permet d’évaluer les compétences d’écoute qui interviennent dans la relation, la communication et l’apprentissage. Il s’intéresse donc à l’art de donner et de recevoir de l’information. Nous entendons par « information » tout ce que nous avons perçu du réel et dont nous nous servons pour rester en équilibre avec notre environnement. Le test d’écoute donne dès lors un instantané de la manière d’être au monde, de communiquer avec lui et de le comprendre.
Il permet une lecture projective à deux niveaux : vestibulaire et cochléaire, dans les dimensions réceptive et expressive des fonctions de l’écoute. Il met également en lumière la capacité dynamogénique de l’oreille et le mode d’investissement de l’énergie accumulée dans ces différents niveaux et dimensions.
Bilan d’audition centrale. (B.A.C)
Les Cahiers de l’Audition, en 2012, présentent une batterie de tests de l’audition centrale en français, créée à Liège au début des années 2000 par Jean-Pierre et Laurent Demanez. Il s’agit du BAC (Bilan Auditif Central), qui est normalisé pour une population âgée de 5 à 80 ans.
Le BAC permet de vérifier le bon fonctionnement des processus auditifs centraux : l’efficacité du décodage phonétique est évaluée grâce au test de Lafon, la séparation et l’intégration binaurales sont investiguées par le test d’écoute dichotique, et la reconnaissance de configurations temporelles est estimée via le test de patterns de fréquence et de durée. Le transfert interhémisphérique est, quant à lui, contrôlé durant le test d'écoute dichotique et la reconnaissance de patterns temporels.
Il est composé :
D’une épreuve de Lafon : Le patient doit répéter un par un des mots uni-syllabiques, qui sont présentés en écoute binaurale. Une liste de 30 mots est présentée au patient par suites de dix items, alternativement sans bruit, puis avec bruit. L’intensité du bruit de fond est égale à celle du stimulus.
D’un test d’écoute dichotique : Deux informations verbales sont passées simultanément dans le casque. Celle pour l’oreille gauche est différente de celle destinée à l’oreille droite. Leur durée est parfaitement similaire, et l’intensité sonore doit elle aussi être la même dans les deux oreilles.
Le test est composé de 50 paires d’items (gauche/droite), réparties en listes de dix. Il est demandé au patient de répéter les items qu’il entend dans l’oreille désignée (OD) au préalable, ou de répéter les deux items perçus (Oreille Non Désignée, OND).
Primary auditory threshold tests (PATT)
Ce test a été mis au point par notre collègue Peter Schneider, neuroscientifique, physicien et musicien; chef du groupe de travail "Musique et cerveau" à l'Hôpital universitaire de Heidelberg.
Ses recherches portent sur la musicalité et la recherche cérébrale, la perception du son dans le cerveau, l'apprentissage musical, le talent musical et artistique, l'ouïe absolue et relative, les acouphènes et la sensibilité au bruit. À la clinique neurologique de l'Université de Heidelberg (département de neuroradiologie et de biomagnétisme), Il est actuellement responsable du projet AMseL (audio et neuroplasticité de l'apprentissage musical) et du projet audio (neurolasticité auditive de l'adulte) en coopération avec les universités Unispital de Bâle et la Musikakademie Cerveau musical).
Il s’agit de 3 Tests de seuils de différenciation de la hauteur du son, de l’attaque du son (attaque douce ou dure) et de la durée de son. Pour en faciliter la passation, tantôt avec les enfants, les adolescents, ou encore les adultes, nous avons adapté ces tests avec la procédure „alternative-forced-choice“(AFC) de S.Ewert, (voire. Jepsen, Ewert & Dau, 2008). Cette procédure permet une mesure plus précise des seuils de perception qu’avec des tests qui utilisent des valeurs de seuils déterminés fixes. (Sutcliffe and Bishop, 2005 ; Huss et al., 2011). Ils permettent une analyse scientifique dans le domaine du traitement auditif subjectif et du développement du langage. Cette méthode de testing informatisé évalue la capacité auditive (qui diffère énormément de sujet à sujet ; (>facteur100)) avec les valeurs de mesures scientifique exacte (Cent = 1/100 demi-ton pour évaluer la hauteur du son, et Millisec. (Ms) pour mesurer le temps) la personne en test entend des paires de sons sinusoïdaux à travers un casque. Dans l'utilisation standard, la valeur de départ et de référence est un son sinusoïdal à la fréquence de 500Hz, dans une zone fréquentielle ou l’ouïe humaine et le cortex montre sa plus grande sensibilité.
Biomarqueurs neuraux pour la dyslexie, le TDAH et le TDA dans le cortex auditif des enfants.
Serrallach, B., Gross, T., V. Bernhofs, D., Engelmann, D., Benner, J., Gündert, N., M. Blatow, M., Wengenroth, M., Seitz, A., Brunner, M., Seither. , S., Parncutt, R., Schneider, P, Seither-Preisler, A (2016). Frontiers in Neuroscience, 10, 324.
La taille et la synchronisation du cortex auditif favorisent l'acquisition de compétences musicales, d'alphabétisation et d'attention chez les enfants.
A. Seither-Preisler, R. Parncutt et P. Schneider (2014). The Journal of Neuroscience, 33 (34), 10937-10949.
Effets positifs de la création musicale sur la perception et la cognition d'un point de vue neuroscientifique.
Seither-Preisler A. & Schneider, P (2015). Dans Music in Medicine (Ed. G. Bernatzky et G. Kreutz, Springer-Verlag Wien), 375-394.
Épaisseur corticale réduite dans le gyrus de Heschl en tant que marqueur in vivo du cortex auditif primaire humain.
Zoellner, S., J., Zeidler, B., Seither-Preisler, A., Christiner, M., Seitz, A., Goebel, R., Heinecke, A., Wengenroth, M., Blatow, M ., Schneider, P. (2018). Cartographie du cerveau humain.
Les corrélats neuroanatomiques de l'aptitude aux langues étrangères
Turker, S., Reiterer, SM, Schneider, P. et Seither-Preisler, A (2018). Dans: SM Reiterer (Ed.) Exploration de l'aptitude linguistique: Vues de la psychologie, des sciences du langage et de la neuroscience cognitive. Heidelberg ao: Springer.
Audio et neuroplasticité de la perception sonore.
Schneider, P., J. Benner, B. Zeidler, M. Christiner, A., A. Seither-Preisler et D. Engelmann (2018). ACOUSTICS, 16ème
"Quand la musique parle": la morphologie du cortex auditif en tant que marqueur neuroanatomique de l'aptitude au langage et de la musicalité.
Turker, S., Reiterer, SM, Schneider, P. et Seither-Preisler, A (2017). Frontiers in Psychology, 8, 2096.
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